La réunion annoncée des opposants Congolais autour de l’ancien Président Joseph Kabila à Naïrobi continue de susciter de vives réactions au sein du gouvernement. Pour Patrick Muyaya, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, cette rencontre n’a rien d’un dialogue politique, mais tout d’une entreprise visant à fragiliser la stabilité institutionnelle de la République Démocratique du Congo.
« Une question secondaire pour le gouvernement »
Face à la presse, Patrick Muyaya a minimisé la portée politique du rassemblement prévu dans la capitale kényane, qu’il qualifie d’initiative « accessoire » menée par des acteurs en perte d’influence.
« Pour nous, ce n’est pas la question principale. C’est une question accessoire, j’ai envie de dire. Tout à l’heure, lorsque je discutais avec un compatriote à ce sujet, il m’a dit : « Mais Monsieur le ministre, ne voyez-vous pas que c’est comme un étrange mélange de fugitifs, de condamnés ou de personnes liées par un point commun qu’on appelle la frustration ? » Et qui se sont retrouvés, malheureusement, dans une capitale qui commence à devenir un peu une capitale du complot contre la RDC. Je n’ai pas besoin de rappeler les tristement célèbres mouvements qui sont nés là-bas », a-t-il dit.
Cette allusion fait clairement référence aux initiatives politiques et militaires nées à Naïrobi, souvent accusées par Kinshasa d’entretenir un climat hostile à la stabilité congolaise.
« Une nostalgie des privilèges perdus »
Pour Muyaya, ce conclave ne vise pas à promouvoir la paix, mais plutôt à redorer l’image d’anciens dirigeants frustrés par la perte de leurs privilèges politiques.
« Lorsque vous regardez les personnes qui se retrouvent à Nairobi, vous voyez comme un climat de nostalgie des privilèges perdus. Et aujourd’hui, quand vous lisez ce qui en est ressorti, vous avez la certitude que l’action du président de la République dérange. Parce qu’aujourd’hui, nous sommes en train de relever la République démocratique du Congo, et cette idée est sûrement insupportable pour certains qui, pendant des années, n’ont pas su donner un tel élan à notre pays », ajoute-t-il.
Le ministre souligne que les réformes engagées par le président Félix Tshisekedi, notamment en matière de gouvernance, de diplomatie et de redressement économique, sont désormais reconnues à l’international un contraste, selon lui, avec les années de stagnation sous les anciens régimes.
« Le faux prétexte de la paix »
Le porte-parole du gouvernement met également en garde contre le discours « pacifiste » des organisateurs de la réunion. Selon lui, le thème de la paix sert de couverture à des ambitions politiques contraires à l’intérêt national.
« Le prétexte de la réunion, c’est soi-disant la paix. Mais nous connaissons les rôles des uns et des autres, dont l’histoire reste marquée par la déstabilisation du pays. Le président de la République l’a dit à Bruxelles : il n’organisera pas de dialogue avec des personnes incapables de nommer l’ennemi. Or, dans leur démarche, l’ennemi n’a pas été nommé. Cela montre encore une fois qu’il y a cette forme de complicité entre certains Congolais qui s’associent à l’œuvre de destruction de ce que nous construisons », poursuit-il.
Cette prise de position traduit la ligne dure adoptée par Kinshasa face aux alliances politiques jugées ambiguës ou proches des acteurs extérieurs impliqués dans la crise sécuritaire dans l’Est du pays.
« Un non-événement face aux priorités nationales »
Pour Muyaya, la véritable actualité se trouve ailleurs. Le gouvernement préfère mettre en avant les avancées diplomatiques et économiques initiées par le président Tshisekedi, notamment les programmes de coopération conclus à Washington et à Doha.
« Il faut considérer que pour nous, c’est un non-événement. L’événement, c’était ce que nous avons fait à Washington. Le président de la République a déjà tracé la voie : il y a un processus à Washington, un autre à Doha, et à l’intérieur du pays. Il a rassemblé toutes les confessions religieuses autour d’une feuille de route. En tant que garant de la nation, il décidera le moment venu. Mais il ne sera jamais question d’un dialogue avec les représentants de ceux qui sont aujourd’hui nos agresseurs », renchérit-il.
Nairobi, symbole d’un passé lourd pour Kinshasa
La réaction de Patrick Muyaya prend un relief particulier dans un contexte chargé d’histoire. C’est en effet à Nairobi, en 2023, qu’a été annoncée la création de l’Alliance des Forces Congolaises (AFC), coalition regroupant notamment le mouvement M23, aujourd’hui considéré par Kinshasa comme un instrument de déstabilisation soutenu par le Rwanda.
Ce précédent, encore vif dans les mémoires, explique la méfiance du gouvernement congolais face aux initiatives politiques qui y émergent. Pour Kinshasa, ces rencontres ne relèvent pas du dialogue, mais d’une stratégie de fragilisation de l’État congolais sous couvert de diplomatie parallèle.
En conclusion, à travers la voix de son porte-parole, le gouvernement affirme sa vigilance et sa détermination à protéger la souveraineté de la RDC face à toute tentative d’instrumentalisation politique venue de l’étranger.
Diddy MASTAKI

